OVERTHROW (LUZEVANA)

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le monde se retourne et mon cœur avec. je ne comprends plus rien de ce qui m'entoure, plus rien de ces lieux qui commençaient pourtant à me revenir familiers. deux semaines ici et déjà la france me manque et m'appelle de ces lumières que je jurerais voir au loin, entre deux branches d'arbres ou entre deux réverbères. l'allemagne n'a rien à voir avec la france. francfort est tout ce qu'il y a de plus banal, morose, les rues ici sont sales et dénuées de toute magie. ici, rien ne vit. le ciel est tout noir, beaucoup trop vaste et vide pour qu'on y porte une quelconque fascination. je ne sais pas, je ne sais plus ce que je vois. je ne marche plus réellement droit, mes pas s'avancent au gré de cet équilibre incertain. j'essaie de penser, j'essaie de raisonner, mais rien ne veut se frayer un chemin jusqu'à la logique. qu'ai-je encore fais ce soir ? peut-être ai-je encore erré dans les bars, ou bien au bord des autoroutes, comme autrefois. peut-être me suis-je encore laissée tenté par ces liqueurs trop fortes pour un corps qui ne peut pas tout supporter. sûrement. au fond, ce n'est pas si important. ce n'est pas ce qui compte, le processus. c'est la finalité. et depuis que je suis ici, je ne sais plus où me mener. alors j'ai du certainement décidé de m'abandonner une nouvelle fois, cela ne m'étonnerai pas. je crois avoir retrouvé mon chemin jusqu'au foyer, je pousse la porte qui mène à l'accueil principal, ce n'est probablement pas la meilleure idée, mais à cet instant, je ne peux que faire dans la simplicité. je ne me rends pas réellement compte, le flou envahit mes visions, et j'avance, j'avance, dans ce vide qui m'englobe, dans cette bulle où moi seule semble me trouver. ou apparemment pas. j'entends des voix. une voix. une voix qui m'est connue, une voix criarde et aiguë. les paroles sont encore plus troublées que l'est ma vue. je me retourne, péniblement, les paupières à moitié closes, les cheveux floutant davantage le monde extérieur. - merde, ça va pas d'parler aussi fort ? j'vais pioncer, là.

messages : 70

je t'ai attendue, les yeux rivés au vide, accrochés à l'immensité obscure. je t'ai attendue, comme la lune veillerait sur ses millions d'étoiles tournoyantes. je t'ai imaginée, frêle et pâle, perdue au milieu du néant, au travers des nuées, caressant les buées. je t'ai imaginée te noyer dans les effluves amères de l'alcool trop sec. les yeux rougis, les joues creusées, le cœur meurtri, les membres désarticulés. je t'ai attendue et tu es revenue, comme je t'imaginais, simple poupée perdue. j'ai d'abord vu ton ombre parfaite se glissant dans la rue, ta silhouette sans visage et sans maux, aux mots sourds et au souffle court. et puis tu es rentrée, la douleur grande et oppressante, les prunelles toujours plus sombres et les larmes muettes. la démarche incertaine, les pensées bien trop floues. tu t'accroche au mur, voulant échapper à la chute infinie. tu emmènes avec toi les tempêtes et les pluies, tu glaces mon cœur, mon corps, de ce froid qui t'emplit. je me fais soudain immense, sortant de ma noirceur, prête à t'engloutir toute entière au travers de ma folie. comme un monstre masqué, je surgis de ce vide. je m'arrête un instant pour contempler ta petitesse, tes maladresses et puis tes yeux comme des plaines vides et hurlantes.
- où penses-tu aller, luzia ?
la voix fait siffler tes tympans, l'alcool fait un tour au travers de ton sang. ta peau est si pâle, translucide. tu es comme éclairée au travers de la nuit, une minuscule étoile qui brille.
- il est hors de question que tu retournes dans ta chambre tant que tu ne m'auras pas expliqué ce que tu fais là, à cette heure ridicule et puis dans cet état.