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Il faut pas beaucoup pour foutre une vie en l’air. La mienne, elle avait bien commencé je crois, même si je suis pas trop sûr du moment exact où ça a foiré. Pas d’histoire de secret de famille caché, pas de traumatisme d’enfance, de violence, rien du tout. J’ai grandi comme un enfant banal, je travaillais même à l’école, tout allait bien je vous dis. Mais quoi ? Ben ça a pas duré. J’ai grandi et je me trouvais bizarre, parce que j’aimais pas aller vers les autres. J’aimais pas être entouré de dizaines de personnes, j’aimais pas parler fort pour que tout le monde m’entende. J’étais pas très populaire, mais est-ce que j’en avais quelque chose à foutre ? Pas tellement. Peut-être un peu, quand je voulais sortir avec une fille au collège et qu’elle préférait les bg qui sortaient déjà avec trois autres filles. Tant pis.
Ce que je veux dire, c’est que j’étais pas prédestiné à me planter. Je ne fais pas partie de ceux qu’on voit en se disant "Putain il a vraiment pas eu de chance dans la vie.". De toute façon, je n'aime pas parler de moi. Je n'aime pas parler de grand-chose. J'aime pas les gens. Je suis de ceux qu’on n’a pas envie d’aider, de ceux qui ne se bougent pas le cul. Mais je suis pas moins dans la merde pour autant.
Je suis coupable d’avoir fait ce qu’on dit toujours aux gamins. J’ai suivi mon rêve. Breaking news, ça n’a pas fonctionné comme dans les films. Je chantais, je chante même encore parfois. Y a que comme ça que j'arrive à m'exprimer en public sans trembler comme une feuille en regardant les gens avec des yeux ronds comme des billes. Avec ma petite guitare, je me voyais déjà sur la route des Beatles. Plus j’écrivais, plus je composais et moins j’allais en cours. C’est dommage hein ? Je chantais dans la rue pour essayer de me faire connaître, j’ai chanté dans tous les coins de ma ville, tous les bars, toutes les fêtes, et quand j’ai eu toutes les grand-mères de la ville dans la poche, je me suis cru assez fort pour gagner la capitale. Londres, le grand saut, j’étais si sûr de décrocher un contrat que je suis parti sans me retourner.
Du haut de mes 18 ans, je me la jouais rocker solitaire et cool. J’ai envoyé chier mes parents, je traînais dans tous les bars avec ma guitare, je sonnais chez toutes les agences que je trouvais pour qu’on accepte de m’écouter. La vérité, c’est que personne n’accepte. On te jette comme un chien dans la rue, et ça a rapidement été la déchéance. On croit toujours que c’est cool de jouer dans les bars, dans les boîtes, mais ça rapporte rien. On ne vit pas avec ça. J’ai essayé pourtant.
Ça a duré longtemps, longtemps. Je chantais toujours, mais j’ai fini par ne plus pouvoir me payer d’appart – de chambre pourrie devrais-je dire. Alors Londres, je l’ai classée comme une ville de cons et je me suis tiré. J’étais encore trop fier, encore trop borné pour me dire que je m’étais planté. Je me suis barré pour gagner le continent. La France, les Pays-Bas, l'Allemagne. J’ai tout essayé, parfois je ne savais même plus trop où j’étais. J’ai tenté toutes les grandes villes possibles du coin, mais partout la même plantade. Le bordel intersidéral, et plus un rond pour rentrer à la maison.
Peut-être que je n’avais pas non plus trop envie de rentrer la queue entre les jambes, et d’admettre que j’avais foiré en beauté. Je ne voulais pas entendre cet atroce "je te l’avais dit", alors je suis resté. J’ai erré, et puis à force de traîner dans les bars j’ai fini par picoler. C’est facile pour les gérants, de te filer un coup à boire et un sandwich au lieu de te payer. J’avais pas de quoi dire non, alors au moins j’avais de quoi bouffer.
C’était carrément merdique comme vie, mais je savais plus quoi faire d’autre. Quand on a tout envoyé se faire mettre, on ne peut plus revenir avec la bouche en cœur. Ou peut-être que j’aurais pu mais que je n’ai pas su. Je sais pas. Je perdais du poids, mais je n’avais pas faim. Une fois j’ai mangé, et j’ai passé la nuit à vomir du sang. Mauvais signe ouais, avec la fièvre on a fini par me traîner à l’hôpital. Je sais même pas qui a fait ça, et je ne sais pas si je suis reconnaissant ou si j’aurais préféré qu’on me laisse crever comme un connard dans la rue. Hépatite, liée à une maladie du foie. Je le revois encore, le médecin à moitié chauve avec ses petites lunettes. Je le revois au bout de mon lit, avec son doigt levé comme s’il me menaçait, à me dire qu’il ne fallait plus que je boive d’alcool. J’ai hoché la tête comme un con, je m’en rappelle, en me disant qu’il pouvait bien aller se faire mettre. J’ai bu en sortant, et je suis revenu vite fait à l’hôpital. Ok, mauvaise idée. Cette fois j’avais bien capté, mais j’étais pas moins dans la merde. C’est lui qui m’a dit de rejoindre le Foyer. C’est lui qui m’a dit qu’on allait m’y aider, qu’il fallait que je trouve un job et que j’arrête de boire. Seulement moi, je sais rien faire de mes dix doigts.
 | Coucou  Je m'appelle Pauline et mon petit nom sur l'internet c'est La Volpe. J'ai 21 ans et je suis une future chômeuse (ou femme au foyer si ma copine gagne plein de tune  ). J'ai une petite obsession pour les animaux que je trouve mignons (et y en a beaucoup), le fromage, le vin blanc et les pokémons. J'aime beaucoup Halloween et je sais jamais quoi dire quand je dois parler de moi !Ah, et j'adore Pierre Bellemare  |
